Résumé
L'objectif principal de cette étude était de connaître les caractéristiques des opérateurs ainsi que celles des unités du secteur informel à Abidjan. De façon spécifique, elle devrait permettre de connaître : les caractéristiques des opérateurs du secteur informel ; les caractéristiques des unités de production informelles; l'environnement, la rentabilité économique et la teneur en emplois des activités informelles ; le capital, l'investissement et le financement du secteur informel ; les problèmes et les perspectives des activités informelles. A son terme, l'on peut en retenir les points suivants : Sur les caractéristiques des opérateurs, Les caractéristiques des opérateurs du secteur informel se dégagent en fonction d'un certain nombre de variables sociodémographiques : la commune, le sexe, l'âge, l'ethnie et le niveau d'instruction. Au niveau des communes, il est observé que le nombre d'opérateurs décroît avec le niveau socio-économique des populations. En ce qui concerne le sexe; on observe que les femmes sont surreprésentées parmi les chefs d'unité de production. Ces dernières sont par ailleurs davantage à leur propre compte par rapport aux hommes. Pour ce qui est de l'âge, les personnes d'un âge compris entre 25 et 54 ans sont surreprésentées dans la population des chefs d'unités de production informelles si l'on se réfère à la répartition de la population totale en âge de travailler. Cependant, les personnes d'un âge supérieur sont celles qui sont davantage employeurs. Concernant les groupes ethniques, les mandés du nord, les gour et les personnes naturalisées sont surreprésentés dans le secteur informel. Enfin, on observe que les personnes les moins instruites sont les plus représentées dans la population de chefs d'unités de production informelles. En ce qui concerne les caractéristiques des unités de production, Les unités de production informelles ont été analysées quant à elles par rapport au créateur de l'unité, le type de local, l'appartenance du local, la fourniture en eau, électricité et téléphone et l'enregistrement. A l'observation, les unités de production informelles ont généralement été créées par les personnes qui en sont chef actuellement. Elles ont, pour la moitié d'entre elles, une durée de vie supérieure à cinq ans. Le local dans lequel elles sont installées, quand elles le sont, n'est en général pas professionnel et n'est généralement pas la propriété du chef de l'unité. En ce qui concerne la localisation elle-même, on note qu'environ 81% sont localisées. Parmi ces unités localisées, 21% sont installées à domicile. Les unités de production informelles ne sont généralement pourvues ni d'eau courante, ni d'électricité et encore moins de téléphone. Concernant leur enregistrement, elles ne le sont généralement ni à la mairie, ni à la patente et encore moins au registre de commerce. Pour ce qui est de la tenue de comptabilité, très peu d'entre elles tiennent une comptabilité écrite formelle. La main-d'œuvre du secteur informel a un niveau d'instruction très faible, avec une part très faible (11,6%) d'emplois rémunérés mais majoritairement permanents (81,8%). Elle est recrutée à 18,1% par les relations personnelles qui constituent le mode de recrutement dominant. Celle-ci est rémunérée pour une grande part à la tâche. En ce qui concerne l'environnement, la rentabilité et la teneur en emplois des activités informelles, En tenant compte du secteur d'activité, le secteur des services regroupe le plus grand nombre d'unités de production informelles à Abidjan (87,9%). Un découpage plus fin en groupes de branches permet d'observer que ces unités de production sont pour une grande part dans le groupe « commerce de gros et de détail ; réparation de véhicules automobiles de motocycles et de biens personnels et domestiques ». Selon la profession, les chefs d'unités de production informelles sont constitués majoritairement de « personnel des services et vendeurs de magasin et de marché » (69,5%). La plupart (96,2%) des actifs du secteur informel à Abidjan travaillent au delà des normes légales alors qu'environ 69,6% d'entre eux perçoivent une rémunération inférieure au SMIG. La quasi-totalité (82,6%) des unités de production écoulent leur production auprès des ménages et l'on observe que les hommes ont une clientèle plus variée que les femmes dans le secteur informel à Abidjan. Les petites entreprises commerciales constituent le principal fournisseur des unités de production informelles (54%), davantage dans l'industrie (76,9%) qui a un type de fournisseur moins varié que les unités de services. En ce qui concerne la rentabilité économique, on note que le résultat d'exploitation est plus faible pour les femmes que pour les hommes et que sa valeur moyenne la plus élevée est observée dans le secteur des services. Concernant le capital, l'investissement et le financement du secteur informel, Le niveau du capital est très faible dans le secteur informel à Abidjan (92,4% des unités de production ont un capital inférieur à 250 000 FCFA). Il est plus faible pour les femmes (94,6% des unités qu'elles dirigent ont un capital inférieur à 250 000 FCFA). Par ailleurs, les unités de production à niveau de capital faible sont en plus forte proportion dans le secteur des services (93,6%). En tenant compte des groupes de branches, les groupes « activités de fabrication » et « transports, entreposage et communication » sont celles qui s'exercent dans une moindre mesure avec un capital en deçà de 250 000 FCFA (respectivement 81,5% et 81,3%). En ce qui concerne le financement des activités informelles, une part faible (11%) des chefs d'unités empruntent de l'argent pour faire fonctionner leur établissement, davantage chez les travailleurs à compte propre (10%). Les prêts sont principalement obtenus auprès de la famille ou des amis (70,6%) ; une part non négligeable d'entre eux est obtenue auprès des fournisseurs (13,4%) tandis que celle obtenue auprès des banques et institutions de microcrédit est très faible (3,4%). Les prêts obtenus sont consacrés pour une grande part à l'achat de matières premières (62,2%) ; toutefois, l'usage du crédit est plus diversifié chez les patrons. Pour ce qui est du type de contrat avec le prêteur, on note que très peu d'emprunts sont obtenus par un accord légalement reconnu (4,2%), davantage pour les travailleurs à compte propre (3,3%). Pour ce qui est du recours aux banques, très peu de chefs d'unités de production (1,3%) sollicitent un prêt auprès des banques pour leur activité. Quant à la réponse de celles-ci, l'on observe que les patrons qui sollicitent des prêts auprès d'elles en obtiennent relativement plus (33,3%) par rapport aux travailleurs à compte propre qui en sollicitent (10,5%). Les chefs d'unités de production ne sollicitent pas de prêts auprès des banques en général parce qu'ils jugent les démarches trop compliquées (47%) ou qu'ils ne veulent pas emprunter (24,7%). Pour ce qui est des institutions de microcrédit, seulement 22,3% des chefs d'unités de production les connaissent; cette part est un peu plus élevée chez les patrons (30,1%) et les chefs d'unités ont pour la plupart connu ces institutions par le « bouche à oreille » (53,2%). Enfin, sur les problèmes et perspectives des activités informelles, Le métier du chef d'unité de production est la modalité qui enregistre le plus fort pourcentage comme explication du choix de l'activité (27,5%) tandis que celle portant sur des « recettes plus stables qu'avec d'autres » enregistre le plus faible (5,5%). Le niveau de l'activité dans le secteur informel est fixé principalement en fonction de la prévision de la demande (32,3%) ou des commandes fermes (27,9%). La plupart des chefs d'unités de production informelles ont une attitude attentiste vis-à-vis des clients (62,9%). Les difficultés d'écoulement de la production, pour manque de clientèle (35,4%) ou pour concurrence excessive (25,4%) sont les plus courantes au niveau du secteur informel à Abidjan. Les moins courantes sont celles liées au « recrutement de personnel qualifié » (0,9%) et aux « difficultés techniques de fabrication » (1%). L'accès au crédit est le type d'aide le plus souhaité par les opérateurs du secteur informel à Abidjan (48,9%). La plupart des chefs d'unités de production informelles souhaiteraient développer davantage leur activité s'ils obtenaient un crédit pour le faire (61,2%). Les perspectives d'embauche sont faibles dans le secteur informel à Abidjan puisque seulement 22,4% des chefs d'unités ont l'intention d'embaucher au cours de l'année qui suit. Or, il ne s'agit que d'intentions. Les réalisations pourraient être encore plus faibles. Le manque de clientèle (57,4%), le manque de liquidités (46,1%), la concurrence (28,5%) et le manque de matières premières (24,4%) sont énumérées par les chefs d'unités comme les principales difficultés risquant de faire disparaître leur établissement. Le manque de liquidité (54,1%), le manque de clientèle (47,2%), l'excès de concurrence (24,3%) et les problèmes de locaux, de place (15,7%) sont les obstacles qui empêchent le développement de l'activité du secteur informel. Les chefs d'unités de production ont en général foi en l'avenir de leur activité (76,9%). Pour 14,4% des unités de production, le bénéfice aurait augmenté au cours de l'année écoulée alors qu'il serait resté constant pour 48,1% et diminué pour 37,5% d'entre elles. L'amélioration du bénéfice est imputable pour une grande part à la hausse de la production vendue (69,7%). La baisse du bénéfice est elle aussi imputable en général à celle de la production vendue (58,1%). Cependant, il est imputable pour une part importante à la hausse du prix des intrants (27,8%).